La cour de cassation vient de se prononcer sur le sujet des fleurs de CBD dans la lignée de la jurisprudence Kanavape. La plus haute juridiction Française interdit à la France d’entraver le commerce des fleurs légales au nom des traités Européens. Consultez l’arrêt n°810 du 23 juin 2021! ( Voir ci-dessous )
On n’y est, c’est officiel! Une victoire que nous pouvons lire sur les réseaux sociaux. Attention toute fois, le cannabis proprement dit reste illégale en France ( soit une fleur avec un taux supérieur à 0,2% de THC ).
Arrêt n°810 du 23 juin 2021 (20-84.212) – Cour de cassation – Chambre criminelle
– ECLI:FR:CCAS:2021:CR00810
SUBSTANCE VÉNÉNEUSE – LOI ET RÈGLEMENT – RESPONSABILITÉ PÉNALE
Cassation partielle
Demandeur(s) : M. [E] [P]
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Dans le cadre d’une enquête ouverte pour des faits d’infractions à la législation du travail, les services de police ont découvert de manière incidente, le 22 janvier 2019, dans les locaux d’un commerce à l’enseigne Foxseeds à [Localité 1], divers produits contenant du cannabis, retirés de la vente et entreposés dans le réfrigérateur dans l’attente de l’issue d’une procédure similaire concernant des produits découverts dans un autre magasin de la même enseigne à [Localité 2]. Le dirigeant de la société, M. [E] [P], a notamment été poursuivi du chef d’infractions à la législation sur les stupéfiants.
3. Par jugement du 3 juin 2019, le tribunal correctionnel l’a relaxé de ce chef, l’a déclaré coupable de faits d’exécution de travail dissimulé et l’a condamné à deux mois d’emprisonnement avec sursis.
4. Le procureur de la République a interjeté appel, à titre principal, et le prévenu, à titre incident.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré M. [P] coupable du délit de complicité de détention, d’offre ou cession et d’acquisition non-autorisée de produits stupéfiants, alors « que les États-membres de l’Union européenne ne peuvent adopter de restrictions quantitatives à l’importation, ou toute autre mesure à effet équivalent de nature à entraver le commerce à l’intérieur de l’Union ; qu’or, l’interdiction de commercialiser des sommités fleuries de cannabis, légalement produites dans un autre État-membre et ne contenant aucune substance psychotrope, constitue une mesure d’effet équivalent non-justifiée au regard de la moralité publique, l’ordre public, la sécurité publique, la protection de la santé et la vie des personnes ; qu’en décidant le contraire, la chambre des appels correctionnels a violé les articles 34 et 36 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 34 et 36 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et 593 du code de procédure pénale :
7. Il résulte des deux premiers de ces textes, tels qu’interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 19 novembre 2020, aff. C-663/18, B.S, C.A), qu’ils s’opposent à une réglementation nationale interdisant la commercialisation du cannabidiol (CBD) légalement produit dans un autre État-membre, lorsqu’il est extrait de la plante de cannabis sativa dans son intégralité et non de ses seules fibres et graines, à moins que cette réglementation soit propre à garantir la réalisation de l’objectif de protection de la santé publique et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint.
8. Il résulte du texte précité du code de procédure pénale que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties.
9. Pour déclarer le prévenu coupable de complicité d’infractions à la législation sur les stupéfiants, l’arrêt attaqué énonce, qu’aux termes de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique, la production, la fabrication, le transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi du cannabis, de sa plante et de sa résine, des produits qui en contiennent ou de ceux qui sont obtenus à partir du cannabis, de sa plante ou de sa résine et des tétrahydrocannabinols (THC) sont interdits et que l’arrêté du 22 août 1990, dans sa version applicable, précise, dans son article 1, que seules sont autorisées la culture, l’importation, l’exportation et l’utilisation industrielle et commerciale (fibres et graines) des variétés de cannabis sativa L. dont la teneur en delta-9-THC n’est pas supérieure à 0,20 %.
10. Il retient que les produits saisis et analysés étaient constitués de sommités fleuries de cannabis contenant du THC à l’état de traces.
11. Les juges en déduisent que la détention des produits saisis, qui avaient été proposés à la vente pendant une certaine période, avant d’en être retirés pour être placés dans un lieu inaccessible aux clients, était illicite et en concluent que le prévenu, en donnant pour instruction à sa salariée de vendre ces produits avant leur mise à l’écart, s’est bien rendu coupable du délit de complicité de détention, d’offre ou cession et d’acquisition non autorisée de produits stupéfiants.
12. En prononçant ainsi, sans rechercher, alors qu’elle y était invitée, si les substances saisies n’avaient pas été légalement produites dans un autre État-membre de l’Union européenne, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
13. La cassation, est, dès lors, encourue de ce chef.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Grenoble, en date du 22 juin 2020, en ses dispositions ayant déclaré le demandeur coupable de complicité d’infractions à la législation sur les stupéfiants, et dans ses dispositions relatives aux peines, les dispositions relatives à la déclaration de culpabilité d’exercice d’un travail dissimulé étant expressément maintenues ;
Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;
Président : M. Soulard
Rapporteur : Mme Barbé
Avocat général : M. Valat
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger